Les confréries religieuses d'Adon
Les confréries religieuses ont vu le jour au Moyen Age, et se sont perpétuées au cours des siècles jusqu'à nos jours, même si leur but d'origine, l'intercession par la prière commune du Saint invoqué, a évolué, notamment à partir du 16e, vers la promotion du culte catholique.
La première trace que nous retrouvons pour les confréries religieuses d'Adon figure dans un registre paroissial de 1631.
Deux confréries y sont répertoriées :
La confrérie du St Sacrement, de loin la plus nombreuse, riche de 12 membres
La confrérie de St Jacques, forte de 5 membres.
La population totale d'Adon, à cette époque, est estimée à environ 400 personnes.
Source: Google Books (2)
"La confrérie du Saint-Sacrement est un modèle qui se diffuse au XVIIe siècle et qui se réclame de la dévotion devenue centrale dans le catholicisme rénové du Concile de Trente et devient très vite le fer de lance de la Contre-Réforme.
En France, de telles confréries sont nombreuses au milieu du siècle autour de Paris, en Bretagne et en Provence, puis elles se développent dans les diocèses du Nord-Est, ainsi que dans ceux de la province de Lyon et d'Auch ; à l'échelle européenne, on observe une onde de propagation qui part des pays méditerranéens pour atteindre ensuite les pays germaniques et la Pologne, en suivant la progression de la Contre-Réforme.
Les créations sont favorisées par les évêques qui veulent en ériger dans chaque paroisse et ceux qui les dirigent sont aussi aux commandes des cités. Mais, tout en adorant ostensiblement l'hostie consacrée, ce qui fait de ces confréries des confréries de combat, l'accent est mis, dans les statuts comme dans les images, sur la dévotion personnelle centrée sur la communion fréquente, l'ennemi n'étant plus l'hérétique mais l'impie."(1)
Deux siècles plus tard, nous sommes toujours en présence de deux confréries :
Un rapport de 1856, préparé par l'abbé Bernardin (3), curé d'Adon, et premier bénéficiaire du nouveau presbytère d'Adon, à l'occasion de la visite Archi diaconale qui se préparait, nous livre tous les détails de la vie de ces confréries, et plus généralement de la vie religieuse à Adon:
«... ces confréries sont régies par quelques actes de Statuts, sans trace ni date d'ordonnance ou d'érection. Aucune indulgence attachée, donc aucune affiliation.
30 membres de la confrérie de la Sainte Vierge (Jeunes filles et femmes) et 10 membres de la confrérie du Saint Sacrement.
Un bâtonnier et une bâtonnière reçoivent les fonds, distribuent le Pain Bénit, tiennent registres des recettes et dépenses sous la surveillance de Mr le Curé, qui met dans une caisse à part les fonds en donnant récépissé devant témoin ad hoc.
Les fonds si modiques sont employés facilement à faire célébrer les offices religieux et à entretenir et renouveler les objets du culte de la Sainte Vierge et du Saint Sacrement.
Les recettes de la confrérie du Saint Sacrement s'élèvent environ de 6 à 8 francs, et celles de la confrérie de la Sainte Vierge à 20 Francs.
On cumule ordinairement deux ou plusieurs années pour atteindre le chiffre nécessaire à l'achat des objets désirés.
Les dignitaires sont simplement ceux nommés ci-dessus, un bâtonnier et une bâtonnière, qui a ordinairement un vice bâtonnier.
Il n'y a pas d'assemblée régulière possible. Le jour de l'Assomption étant un jour de renouvellement, un plus grand nombre s'y trouve quelque fois, mais la nature de la population dispersée, sans éléments d'union, n'offre guère de renforcement d'intérêt.
Le Pain Bénit chaque fête de la Vierge, l'offrande du jour et le service qui se doit après le décès (de ses membres NDR), voilà en quoi consiste toute la confrérie pour la plus part de ceux qui en font partie.
Les paroissiens des deux extrémités de ma paroisse se connaissent à peine, et un quart de ces habitants ont plus de rapport souvent avec une ou deux paroisses voisines.
Plusieurs tentatives d'invitations au tableau d'inscription pour raviver la confrérie du St Sacrement ont échoué. La cherté du pain qui rend coûteuse l'offre du Pain Bénit retient un bon nombre de gens, presque tous peu aisés.
Généralement les confrères de la sainte Vierge font leur Pâques et semblent avoir plus l'esprit paroissial. Il n'en est pas de même pour les confrères du St Sacrement, beaucoup plus indifférents.
Les moyens d'améliorer ces confréries et de les rendre plus fructueuses sont les mêmes que pour l'amélioration de la paroisse. Cependant on peut ajouter que les signes extérieurs ayant un grand empire, des signes distinctifs étant donnés comme tableaux, images... puis, une admission solennelle, s'il était possible, auraient sans doute quelque effet.
Je m'étais proposé d'abord d'ériger un autel convenable de la Ste Vierge et bien orné, mais il a déjà fallu renouveler bannières, linge... et les ressources manquent...
Joignez à cela une population si difficile à saisir, qui vous échappe et que ses occupations absorbent totalement : il y a des difficultés qui forcent à rester à peu près au même point sous ce rapport.
Sur le dernier sacrement, on peut dire que personne ne le refuse : on y met plus ou moins de zèle, et cela dépend aussi des parents.
Il n'existe pas d'autres associations ni corporations à proprement parler. Car on ne peut appeler ainsi la réunion de prétendus confrères de St Nicolas et de Ste Catherine qui viennent offrir un Pain Bénit au dimanche qui suit la fête de leurs saints, et les quelques abus qui tendent à se glisser font hésiter et décider presque à refuser de bénir ce pain.
On ne peut encore donner le nom de corporation aux quelques laboureurs qui se réunissent au charron et maréchal pour faire célébrer une messe de St Eloi. Ils déjeunent ensemble, règlent leurs affaires...
Il n'y a pas de scandale, mais nulle part, unité, ensemble possible sur cette paroisse dispersée. »
Les difficultés mentionnées par l'abbé Bernardin tiennent au fait que la grande majorité, probalement plus de 80%, des habitants d'Adon était fortement dispersée dans les fermes et manoeuvreries des grands propiétaires terriens.
Aux conditions de vie et de travail sans doute assez difficiles, s'ajoutait l'éloignement du centre du bourg et donc de l'église.
La photo du cadastre de 1835 ci dessous illustre cela parfaitement; il est en effet facile de constater que le nombre de constructions autour de l'église est très restreint: 15 habitations tout au plus, abritant environ une soixantaine de personnes sur les 477 que comptait la population d'Adon en 1856!
(1) Yves Krumenacker, « Marie-Hélène Froeschlé-Chopard, Dieu pour tous et Dieu pour soi. Histoire des confréries et de leurs images à l'époque moderne, Paris, L'Harmattan, 2006, 401 p. », Chrétiens et sociétés [En ligne], 14 | 2007, http://chretienssocietes.revues.org/471
(2) Cet ouvrage est consultable sur http://books.google.fr/books?id=IPkFI5-1X8EC&hl=fr&pg=PP2#v=onepage&q&f=false
(3) Fond des Archives Diocésaines, Archives Départementales du Loiret