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Titre du blog : Adon: une Histoire
Auteur : adon45
Date de création : 07-08-2011
 
posté le 01-12-2011 à 21:19:24

                               Le Château d'Adon et ses Seigneurs (1)

 

                                                        1000 - 1300

 

 

Probablement aux alentours du XI ou du XIIe siècle, le premier "chateau" fut érigé à Adon.

Il s'agissait en fait d'une motte castrale telle qu'à partir du Xe siècle, en Europe, on en construisit presque partout. Parfois orthographiées « Mothes », elles  correspondaient à un nouveau besoin de défense des territoires et des populations.

En effet, les armures et armes de l'époque Carolingiennes étant extrêmement lourdes, et très peu mobiles, il fallait pouvoir défendre ses biens et ses gens par de nouveaux moyens contre des bandes armées plus mobiles.

 

 

Photo: Julien Chatelain 

Reconstitution de la Motte à St Sylvain d’Anjou

Les mottes castrales (1) - comme leur nom l'indique - sont désormais assimilées aux châteaux. Dans une première période, le château a changé de vocation puisqu'il ne s'agit plus d'un simple retranchement défensif comme on en a construit au cours du haut Moyen Âge (tels les castra érigés contre les Normands).

 

 

 

 

 

À partir du Xe siècle, il répond toujours en premier lieu à la fonction défensive, mais devient progressivement « la résidence fortifiée d'un puissant et de son entourage ». À ces deux usages, le castellologue Philippe Durand ajoute l'aspect symbolique.

 

En effet, l'architecture et le décor contribuent à « mettre en évidence la classe aristocratique et son rôle dans la société ». Autrement dit le château de l'an mille remplit trois fonctions : la résidence seigneuriale, la défense (naturelle ou passive) et enfin le symbolisme culturel et social.  

 

Photo: Julien Chatelain 

Exemple de Motte (reconstitution)

 

Du point de vue matériel, le château à motte se caractérise par deux éléments principaux : la motte et la basse-cour. La motte est un tronc de cône aux flancs pentus, dont l'inclinaison est globalement la même (30°) et dont la hauteur se situe entre 4 et 15 mètres. La hauteur semblait indispensable puisque au milieu du XIIe siècle, l'archidiacre de Thérouanne écrivait :

 

 « Les hommes les plus riches (...) [de Flandre] ont coutume d'élever (...) une motte aussi haute que possible (...) de creuser tout autour une fosse. »(2)

 

 

 

 

 

 

 

En général, les mottes avaient un diamètre à la base de 30 mètres, un diamètre sommital de 10 m et une hauteur de 10 m.

 

Ces mottes étaient relativement faciles à construire, avec des matériaux disponibles localement : pierres et bois. On estime qu'une motte était construite avec un équivalent de 2000 journées/homme, soit environ 3 mois avec 30 ouvriers.

 

 

Reconstitution vidéo 3D d'une motte

 

 Réalisation : Laurent Châtellier, Kiwimage      Production : Conseil Général des Côtes-d'Armor


 

 

 Le site de la Motte à Adon

La motte d'Adon date très probablement de cette époque et a correspondu avec le premier établissement de son « Seigneur ».

Son emplacement aujourd'hui est un joli jardin d'agrément soigneusement entretenu par ses propriétaires. Visible de la route qui mène à Boismorand, on distingue encore nettement, lorsque les eaux sont basses, les grosses pierres servant à la consolidation de l'île qui supportait l'édifice.

 

 

 

 

L'emplacement des mottes ne devait rien au hasard, et il s'agissait le plus souvent de protéger un accès ou de défendre une position particulière.

 

Pour Adon, il faut se rappeler qu'à cette époque, le pays était extrêmement marécageux, et que pour le passage des marchandises et des personnes, on ne pouvait franchir certains de ces marécages qu'au Gué Rouse à la Flinière, ou au Gué Patou. Puis au bas des Cris, il restait encore un passage très étroit à franchir, commandé par un petit étang : c'est là que fut construite la Motte d'Adon (3)

 

Il n'existe aucune trace ni de la date de construction ni de l'édificateur de la Motte d'Adon, et il nous faut avancer assez loin, en 1616, date à laquelle Jacques Pommereau  est répertorié propriétaire. (3)

Ce dernier, « Contrôleur en Maréchaussée » de Gien (4), faisait partie d'une grande famille berrichonne dont une branche, installée à Gien, avait des postes influents.

 

 

Mais, revenant au Moyen Age, le fief d'Adon est vassal d'une famille puissante, même si faute de descendance mâle, son influence dura moins de deux siècles, ce qui est néanmoins fort respectable.

 

En effet, la famille de Feins, nommés d'après leur fief, avait pour résidence un vaste château féodal, dénommé La Bergerie, aujourd'hui disparu. Les seigneurs de Feins, appartenaient à une famille qui jouissait, dès les premiers temps du moyen âge, d'une grande réputation de noblesse et de fortune. Ils étaient sans doute, à l'origine, des vassaux des comtes de Bar ou de Champagne. (5)

Leur trace est très clairement identifiée dans de nombreux documents d'époque. (6)

 

 

Le premier représentant de la famille connu est Sultan de Feins dont on trouve la trace en 1164. C'est lui qui, ayant pris parti pour le roi contre le Seigneur de Châtillon sur Loing (aujourd'hui Châtillon Coligny), fut probablement récompensé avec la partie de la terre de La Bussière relevant de la châtellenie d'Aillant.

Allié à la famille du comte de Gien, le baron de Donzy, il en obtient le reste et devient ainsi seul maitre du territoire. (6)

 

 

Monnaie du Comté de Gien 1150 (environ)

 Photo: http://home.eckerd.edu/~oberhot/printfeud-anjou.htm

 

 

Son fils, Etienne, prit la succession  et fit prendre au domaine familial, grâce à son alliance avec le roi Philippe Auguste,  une formidable ampleur.

 

Il est donc légitime de penser que la motte d'Adon fut très certainement mise en place par l'un des premiers représentants de la famille Feins. Elle aurait ainsi fait partie d'un ensemble de constructions défensives sur le territoire de la seigneurie.

 

Après Etienne, c'est Narjod, son fils qui lui succède (il construira le château de Dammarie en Puisaye où résidera sa lignée). La dynastie se terminera avec Agnès de Feins qui fait le dernier dénombrement des propriétés de la famille en 1364.(7)

 

 Chateau de Dammarie en Puisaye

Les possessions des Feins étaient donc assez considérables et couvraient les  territoires de Feins, bien entendu, siège de leur établissement, mais aussi Adon, Escrignelles, La Bussière, Dammarie en Puisaye, Batilly en Puisaye, etc.

On sait aujourd'hui qu'ils furent les bâtisseurs du château de Dammarie, et du tout premier château de La Bussière.

 

 

 

 

(1) Source : Article Motte castrale de Wikipédia  (http://fr.wikipedia.org/wiki/Motte_castrale).

(2) Gauthier de Thérouanne, Vita Johannis, episcopi Tervanensis, 1150

(3) Solange Rameau-Decencière Ferrandière (1947)

(4) Mémoires de la Société des antiquaires du Centre 1927 Source: BNF Gallica

(5) G. de Rubercy, Seigneurie de Dammarie-en-Puisaye 1898 BNF Gallica

(6) voir:  Gallia Christiania Tome III, p. 228, le Cartulaire de Fleury (ou Saint Benoist-sur-Loire) de 1234, etc.

(7) Paul Gache: La Bussière